Il est 13h30 et devant la chambre 316, Emeline et Nathalie (toutes deux aides-soignantes à l’EHPAD de la Sainte Famille) commencent à sentir la pression monter. Dans le couloir, c’est la concentration. Les sourires affichés laissent néanmoins transparaître une petite appréhension. Dans quelques instants, elles vont être briefées, la porte s’ouvrira et ce sera à elles de jouer.

Depuis plusieurs mois, les établissements de la Fondation Saint Charles de Nancy sont engagés dans une démarche active de prévention des risques professionnels. Cela a conduit à la formation de binômes de prévention dans les établissements, formés par la CARSAT Nord-Est. Des binômes en lien direct avec leurs collègues, missionnés pour réaliser des enquêtes de situation et formuler des propositions d’amélioration au Comité de Pilotage de l’établissement.

C’est dans ce contexte que Pauline (ergothérapeute), Patricia « Patou » (aide-soignante), et le binôme de prévention composé de Patricia B. (aide-soignante) et Marc (Responsable technique), ont eu cette idée de projet, qu’ils ont peaufiné jusqu’à sa réalisation, ce lundi 4 avril 2022.

Il est 13h45, Emeline et Nathalie finissent d’être briefé par Pauline et « Patou ». Elles sont concentrées. 13h46, Nathalie toque à la porte de la chambre 316. Une voix lui répond, elle rentre, suivie d’Emeline. C’est parti…

Hémiplégie gauche, alitée, la personne qui occupe la chambre montre déjà sa mauvaise humeur. Elle a faim « et pour le prix que je paie …. » Les aides-soignantes font ce qu’elles ont à faire et ne se laissent pas perturber par leur collègue. Car dans le lit, c’est Patricia B. (aide-soignante et membre du binôme de prévention) qui joue le rôle d’une résidente de l’établissement.

Nathalie observe la chambre, Emeline voit tout de suite l’appel malade qui est mal positionné. Elles sont dans la chambre des erreurs de l’EHPAD de la Sainte Famille, elles ont 30 minutes pour déjouer les pièges prévus par le scénario.

2 groupes de professionnels vont se confronter à la chambre des erreurs. Après Nathalie et Emeline, le second tandem est composé de Pricille (aide-soignante) et de Julie (IDE). Appelée à 3 reprises, Julie expliquera au débriefing à quel point ces appels téléphoniques l’ont « sortie de l’exercice ». 

« Je ne pouvais pas ne pas répondre à ces appels et c’est ma collègue aide-soignante qui a pris le relais à chaque fois », relate Julie. « Cela illustre très bien ce qu’on vit au quotidien, de l’importance de cette relation de travail IDE/AS et des liens de confiance qui existent entre nous. Cela reste représentatif de notre quotidien, on fait la moitié des soins le téléphone coincé entre l’épaule et l’oreille ! Ce qui montre aussi que faire des pansements, des prises de sang ou autres soins techniques sont des actes automatiques chez nous qui ne demandent que « peu » d’attention de la part de notre cerveau (cerveau incapable d’exécuter 2 actes à la fois mais qui passe bien d’une tâche à l’autre à grande vitesse) mais qui accentue le fait que le relationnel pendant le soin ne peut être assuré ! Cela implique également la confiance indispensable dans nos équipes AS qui poursuit le soin sans notre attention totale et met en avant l’importance de la bonne formation initiale et continue des équipes ! » 

Cela reste représentatif de notre quotidien, on fait la moitié des soins le téléphone coincé entre l’épaule et l’oreille !

Julie – IDE

Pricille expliquera avoir été un peu décontenancée par cette « résidente » nouvelle, qui remettait en question certains de ses automatismes. L’exercice a permis de mettre l’accent sur un travail d’amélioration des fiches autonomie, pourtant déjà pensées pour être synthétiques et de lecture aisée avec des codes couleurs ; le passage au révélateur du scénario a clairement montré qu’une amélioration de ces fiches était à prévoir.

Ce débriefing en présence de Céline (Directrice Adjointe), de Myriam (Cadre de santé) et de Guillaume (Responsable Qualité de la Fondation), a mis en lumière l’impact immédiat que la chambre des erreurs peut avoir sur les pratiques et les améliorations à apporter, sur la cohésion d’équipe, sur la sensibilisation à la prévention des risques et sur l’importance de l’observation.

Les 4 salariés qui ont mis en place ce projet ont passé 2 heures pour élaborer ce scénario et le mettre en place. Un travail validé par leurs collègues qui ont trouvé la mise en situation très réaliste, pédagogique et qui leur a permis de s’attaquer à l’objectif fixé sans crainte de jugement, dans une ambiance sympathique.

C’est un beau succès pour cette « Première ». L’objectif est désormais de créer de nouveaux scenarii pour le personnel soignant mais également pour le personnel hôtelier. Des mises en situation qui permettront au fil du temps de mettre l’accent sur des axes de sensibilisation particuliers. L’établissement dispose en tout cas d’un bel outil pédagogique, la volonté est de pouvoir proposer des sessions très régulièrement au personnel de l’établissement.